Jennifer et sa petite fille Salomé

Dans la nuit du 30 au 31 mars 2016 :

 

Le murmure d’une membrane qui se rompt 

 

Dans la nuit du 30 au 31 mars, tout d’un coup, en plein sommeil, je vois et j’entends un « poup » et je sens la poche des eaux qui se déchire tout doucement, je ressens en pleine nuit comme une sensation de membrane tout à l’intérieur.

Il est alors 4 heures du matin et je suis réveillée à 100%, instantanément, en une fraction de seconde, alors que je dormais d’un sommeil paisible et profond. Lentement je me lève et je sens que quelque chose coule de moi. Péniblement je me hisse hors du lit, à ce moment-là, j’ai un pic soudain d’adrénaline, mon cœur s’emballe à fond les ballons, avec la fuite des eaux c’est la panique à bord, car je ne connais pas ce que c’est que de « perdre les eaux », mais je comprends quand même théoriquement ce qui est en train d’arriver et j’ai une pensée réconfortante et très raisonnable qui me dis « ah, mon bébé va naître dans les 24 heures ».

 

Alors, en vent de panique, ça coule, c’est humide, il y a du sang dans les wc, le petit coup d’adrénaline me permet de me déplacer et d’arranger le « dégât des eaux » si j’ose dire, avec serviette hygiénique, culotte spéciale etc., car j’ai aucune idée du phénomène : si je vais perdre 1 litre, 5 litres ou quoi ? Beaucoup en une fois ? En fait, je m’aperçois que ça coule doucement petit à petit, mais ça coule.

 

Et puis je retourne après 10 minutes auprès de mon chéri qui ronfle et qui dort profondément, je choisi de ne pas le réveiller, sachant que la journée qui s’annonce sera longue.

Impossible de dormir ! Alors je fais un truc assez étrange, me demander pas pourquoi, je me mets à écouter de la musique au lit, chose que je n’ai jamais faite, j’écoute mon lecteur mp3 et je suis si profondément émue par la musique que mon cœur se rempli, j’écoute jusqu’au son du réveil de Mickaël, à 6h. C’est là que je lui glisse un « Mick, j’ai rompu la poche des eaux, notre bébé arrive ». Alors on se synchronise pour appeler la sage-femme vers 8h et il s’en va à son travail auprès des chevaux, à 8 minutes de la maison.

 

Je me rendors très profondément pour une heure et lorsque Michaël revient, tout ce que je comprends c’est qu’on a rdv avec la sage-femme pour 16h si rien ne se passe avant.

 

Notre préparation à tous les trois

 

C’est parti pour une journée de parfait « farniente », où nous sommes à regarder des mangas japonais sur l’ordi et à squatter le canapé du salon, tranquillement allongés, en vacances, tranquilles tous les deux ou plutôt tous les trois ;) La journée passe, nous sommes ensembles paisiblement, mon homme se prépare aussi, à sa façon, il s’absente quelque fois pour voir quelqu’un, il s’isole et il fait des choses de son côté alors que moi, je suis à l’écoute de mon corps et des signes du bébé, je suis à 100% disponible à mon accouchement, je me repose, je m’allonge.

 

Arrive 16h et nous partons vers la sage-femme qui se trouve au village d’à côté. Elle m’installe sur une table et me place un ancien monitoring, qui ressemble assez au calculateur de secousses sismiques et on écoute ce qui se passe.

Bébé dors, alors il ne se passe pas grand-chose, je bouge un peu et tout à coup, il y a des « pics », des « contractiounettes », je dirais, des petits pics de rien du tout, mais qui montrent que quelque chose a commencé. Jusque-là j’avais déjà eu quelques contractions qui m’ont connectées avec mon intériorité, qui m’ont ramenée tout à l’intérieur et à m’allonger, mais elles n’étaient pas très fortes.

 

Notre super sage-femme nous propose de bien rester ensemble et de faire plein de choses en privé pour faciliter l’arrivée de notre bébé (ici, je vais pas vous dire quoi ! car c’est à vous de trouver !) et elle nous lance aussi que vu que la poche des eaux s’est rompue, ça serait important que le travail commence et que si rien ne se passe avant 22h, on pourra se préparer à aller en hôpital (pour la première heure le lendemain). En gros, elle nous met un peu la pression !

 

Puis, après cela elle nous donne une recette de cocktail en dernier recours, pour préparer le travail, une potion avec de l’huile de ricin (=plante indienne qui veut dire la main de Bouddha), de la glace, du jus de pomme et deux trois autres ingrédients dont une lampée de whiskey ( !).

Michaël, qui est très fort en préparation de cocktail le préparera pour 22h.

 

Nous gambadons l’après-midi en ville de Nyon pour acheter quelques éléments du cocktail dont l’huile de ricin et puis vu que « je coule » nous ne trainons pas trop.

 

Les contractions tout-azimut et un petit cocktail

 

A la maison, des contractions plus longues ont dès lors commencées et je suis rentrée dans 3 contractions très fortes, qui m’ont plongée à l’intérieur de moi, dans mon ressenti profond. C’est à partir de là que je me relie à la spiritualité de mon corps, à chaque contraction, je plonge à l’intérieur de moi et je peux ressentir mon col de l’utérus, accompagner son ouverture, à chaque contraction, visualiser l’ouverture. Ces contractions sont justes merveilleuses ! C’était comme d’ouvrir la porte de l’univers à chaque fois un petit peu plus!

Cela a commencé vers 21h30, les contractions se sont répétées à peu près toutes les 6 minutes.

 

Ainsi, je bois la potion vers 22h et puis vers 23h, Michaël appelle notre sage-femme car les contractions s’étant espacées toutes les 4 minutes et on se prépare gentiment pour aller à la maison de naissance, toujours dans le village d’à côté. Je sens que le bébé est sur le point d’arriver tout bientôt, j’ai maintenant des grosses, des IMMENSES contractions qui arrivent et que je vis doucement, lentement et qui me mettent…euh….woaw….qui me renversent carrément, …. Comme une crêpe…ou plutôt comme un séisme d’amplitude 10 sur l’échelle de Richter, et je profite pour aller faire pipi entre deux contractions. Et la vers minuit moins dix, là c’était …. si intense, ah ! Comment ça m’a donné des vagues, des vagues qui me traversent et là j’ai vraiment de l’intensité à vivre juste avant de nous déplacer… et puis on décide d’aller à la maison de naissance.

 

La descente de l’escalier était épique et j’avais déjà envie de pousser sur le parking !!!

 

Au coin du feu

 

Arrivée à la maison de naissance : miracle… un petit feu de bois nous attends, une douce musique, la lumière tamisée, la sage-femme…

Dans ces conditions…c’est allé très très vite, la sage-femme m’examine et je suis dilatée à 5 cm, la moitié du travail est fait, me dit-elle, et puis j’accueille des contractions toutes les deux minutes maintenant et moi, je suis profondément dans la contractions, je ressens tout mon corps, je me mets accroupie sur un mini « pouf », un peu comme la position appuyée avec les bras en avant sur le ballon, mais sur un gros coussin et là les sensations étaient tellement fortes et rapprochées, il y avait très peu de temps entre les contractions pour récupérer, je suis même arrivée à un point où il n’y avait pas de récupération entre deux contractions !!! (J’ai appris plus tard que c’était l’effet du cocktail !) A ce moment-là je commence à prendre le petit tube en bambou et je souffle, je souffle pour canaliser ma respiration (je vous envoie aussi une photo de mes deux petits tubes en bambou qui m’ont accompagné à merveille pendant mon accouchement). Petite parenthèse, concernant les « tubes en bambous », il s’agit de souffler dedans avec la bouche, à chaque expire et ils ont la fonction de canaliser le souffle et de « concentrer » l’expire tout en plaçant les muscles abdominaux à leur juste place pour expulser. En fait, le tubes exerce une légère résistance et place le corps dans la forme d’un toboggan énergétique (avec rétroversion du bassin) qui permet de mieux faire glisser son bébé. Il y a un tube large, pour la période des contractions et puis un tube plus fin, qui condense d’autant plus le souffle et permet l’intériorité. Pour cet accouchement j’ai utilisé les tubes en bambous et ils ont été d’une grande aide, je vous les recommande !

 

Ainsi, je me retrouve en appui sur le gros coussin, les bras en avant et accroupie. Dans cette posture, j’ai une partie de moi qui a envie que ça s’arrête, une partie de moi qui a envie de partir de cette intensité et en même temps, je réalise qu’à un moment donné, il n’y a pas le choix, il n’y a pas de refus possible, ni de recul possible, je n’ai pas le choix ! Je dois aller jusqu’au bout…là, c’est certainement l’apogée, et je le sais ! Les IMMENSES contractions me lancent, j’expire à travers le tube de bambou du mieux que je peux et…c’est là que … je me lève tout d’un coup, portée par une FORCE colossale et je m’agrippe au cou de Michaël qui était tranquillement assis près du lit et qui s’était levé pour me retenir. Ici, je dois dire que, je n’ai pas trop regardé ce que lui faisait, il était là, c’est tout ! Et en me levant, j’ai aussitôt une envie de pousser, d’une force, avec une de ces puissances ! Une puissance de la TERRE… et il y a comme un déclic, quelque chose que je connais déjà qui se produit, comme un changement de conscience. C’est assez étrange, comme si je me reliais tout à coup à une espèce de ligne, comme un fil de lumière d’où j’observe ce qui se passe et je contemple ce qui se passe, je vis pleinement mon corps que je ressens si intensément et à cet instant-là, je lui donne plein pouvoir, je lui fais confiance, infiniment…je crois que c’est cela « lâcher-prise ».

 

Force ultime insoupçonnée

 

En fait je comprends ce qui se passe, à ce moment-là de pleine conscience et puis juste là, j’ai envie de pousser fort et il y a un cri, un cri qui vient du fin fond de moi, du fond de ….l’humanité et puis je sens Michaël qui me tient avec force, mais trop haute et je me dis mais c’est juste surhumain de pousser là dans cette position debout avec les os du bassin et j’essaie de descendre un peu et de bouger mon bassin vers l’avant , mais debout, les sensations du sacrum, du bassin sont tellement intenses. La sage-femme me dis « regarde, tu peux sentir déjà la petite tête avec ta main, la tête de ton bébé qui est en train d’arriver », alors je mets ma main et je sens une toute petite bosse, je n’en reviens pas de sentir ça, je me dis « elle est déjà avancée », et ensuite, la sage-femme me place un siège d’accouchement sur lequel je peux m’accroupir et appuyer avec mes jambes. L’intensité est au maximum à ce moment-là et j’ai vraiment l’envie de pousser très très fort et d’abord je pousse faux, parce que debout, c’est difficile d’avoir le mouvement du toboggan et là, je m’assois et je pousse, je sens…je me souviens qu’à un moment, j’ai envie que ça s’arrête, mais je me dis que c’est maintenant qu’il faut pousser ! Je crie, c’est la force de la nature qui me traverse et puis je ressens comme ce matin à 4 heure, lorsque tout a commencé…tout à coup…paf…je vois la circonférence de la tête du bébé (c’est un peu compliqué à expliquer, mais disons que je visualise la tête de mon bébé).

La sage-femme me dit doucement, c’est ton premier bébé, tu peux y aller doucement…et heureusement qu’elle m’a dit ça, parce que la force de la nature que j’ai eu pour pousser…ça allait presque être trop fort !

Lorsque j’ai senti la tête, j’ai poussé doucement, doucement, je sentais l’avancée et après, la tête a passé, les épaules et puis tout le reste.

 

Elle est dans mes bras

 

Je me suis retrouvée avec mon bébé dans les bras et  J’étais assise, je l’ai regardé… mon bébé.

Je l’ai mise sur ma peau tout de suite, elle était toute gluante. Sous moi il y avait une grosse bassine remplie de sang et alors que je contemplais mon bébé, la sage-femme a essayé de faire tomber le placenta cela a pris un peu de temps et puis le placenta est sorti dans la bassine.

Ces instants de clarté totale, d’unité infinie sont indescriptibles par des mots…de sentir ce petit être tout chaud, tout vivant…incroyablement réel, c’est comme toucher au noyau de la vie.

 

Soins de la sage-femme

 

Enfin, pour résumé la suite qui a duré quelques heures, je n’ai plus eu de notion du temps donc c’est assez difficile d’écrire tout ça dans un sens chronologique, je me souviens que j’ai été très faible après l’accouchement et que la sage-femme m’a donné des soins. D’ailleurs c’est tellement beau cet accompagnement d’une femme, et tellement nécessaire et je dirais …sacré. D’abord elle me lave dans la salle de bain, dans la baignoire, en m’aidant à marcher car j’ai tendance à tourner de l’œil. L’eau était tellement douce et apaisante, puis je crois que je me suis évanouie 2 fois car j’avais perdu plus d’un litre et demi de sang et que je tremblais beaucoup. Bref elle s’est bien occupée de moi.

 

C’est drôle comme tout s’est déroulé pour le mieux du côté de mon bébé et j’ai tenu le coup avec une force titanesque et lorsque mon mari est allé dormir avec le bébé, juste à côté, j’ai commencé à me sentir vraiment « ravagée », comme après le passage d’un tsunami ou d’un camion de 4 tonnes.

La sage-femme m’a donné une pomme à croquer et elle a commencé à contrôler mon périnée. J’ai eu droit à plusieurs points de sutures alors que mes jambes tremblaient comme jamais, j’ai vécu les sutures avec courage mais je me réjouissais surtout de retrouver mon bébé. Il y a aussi quelque chose qui se passe « quand le travail est terminé » …il y a des « méchantes » contractions qui apparaissent…comme une piqure de rappel, elles ne servent pas vraiment à l’accouchement car ça, c’est fait mais plutôt elles sont comme un message pour dire au corps à quel point ce qu’il vient de faire était intense et que c’est nécessaire d’intégrer l’expérience entièrement et de ne pas l’oublier, de la mettre aux oubliettes aussi vite que cela… Donc ce sont des contractions un peu ingrates, mais que j’ai quand même accueillie comme il se doit, avec beaucoup d’amour et de conscience ;)

 

Voilà ! Un immense coucou à toutes les femmes qui ont écouté ce récit, mon dernier message est un vrai message de confiance, que le corps de la femme sait ce qu’il doit faire et que surtout…les femmes ont toujours accouché, de tout temps…alors je peux vous dire que vous pouvez leur faire confiance aux femmes et oui…vous pouvez le faire !!!