Curtis le 1er octobre 2016

Avant que Curtis ne naisse je parlais de « mon accouchement » et depuis c’est devenu « la naissance de Curtis ». Pendant toute la durée de ma grossesse je me suis interdite de trop penser au fait que j’allais être maman, par superstition, par peur que si je me mette trop à penser à ce que ce serait quand le bébé sera là...nous n’ayons pas cette chance. Donc tant qu’il n’était pas né mon bébé n’était pas là. Ce n’est que lorsque je le tiendrai bien vivant contre moi que je pourrais commencer à y croire. Et c’est ce qui s’est passé.

J’ai commencé à aller au cours de Martine et Catherine un mois avant la naissance de Curtis. Leurs cours m’ont énormément aidé à me projeter, à imaginer mon accouchement, à m’ouvrir au futur. Une copine m’avait offert le livre de Martine « Accouchement naissance, un chemin initiatique » et les quinze jours avant mon accouchement je faisais les exercices que conseillent Martine pendant une demi-heure tous les jours suivis d’une petite séance de méditation.

Et puis une semaine avant le terme, jeudi 29 septembre 2016 à 23h45 j’ai perdu les eaux, on venait de regarder un Western « Les 7 mercenaires » et on se préparait à aller au lit, ce n’est pas arrivé d’un coup, j’ai senti un filet de liquide tiède qui ne s’arrêtait pas de couler et je me suis dit, là quelque chose est en train de se passer. J’ai prévenu Grant que la nuit serait probablement longue. Je décide d’appeler la clinique pour savoir si je dois venir rapidement car il semble que j’ai rompu la poche des eaux mais les contractions ne sont pas là. Réponse du sage-femme à la permanence, oui venez dans l’heure qui vient, prenez le temps de finir votre valise mais venez. C’est donc ce que je fais, je rassemble mes dernières affaires avant de partir à la clinique mutualiste avec Grant. J’ai une fâcheuse tendance à tomber dans les pommes en cas d’émotions fortes et je suis fière de moi car j’arrive à ne pas tomber dans les pommes dans la voiture durant les 15 minutes de trajet jusqu’à la clinique, ce n’est pas que j’ai mal car les contractions se font toujours attendre, juste beaucoup d’émotions.

Je suis examinée lorsque nous arrivons, la poche des eaux est effectivement rompue mais les contractions n’ont pas l’air de vouloir commencer... Et comme elles n’ont toujours pas commencé 4 heures plus tard, j’ai droit à ma première injection d’antibiotiques car le milieu n’est plus stérile pour le bébé, les heures qui ont suivi ont été les plus pénibles finalement, à me trimballer dans les couloirs avec le cathéter en espérant déclencher les contractions...rien ne semble marcher, ni le ballon, ni l’homéopathie, ni la séance d’acuponcture, ni la marche dans les couloirs. Le bébé n’est pas prêt à descendre. Et moi je m’impatiente je regarde les autres mamans et papas avec leurs bébés dans les couloirs en les enviant. Ça y est leur bébé est là ! Je n’ai pas dormi de la nuit en entendant les autres bébés pleurer, je n’ai qu’une hâte que les contractions commencent, je les attends avec impatience maintenant. Le personnel de la clinique est sympa et entend ma demande de laisser les choses se faire naturellement, on attendra samedi matin pour déclencher les choses si rien ne se passe d’ici là. Vendredi 31 septembre au matin toujours rien, vient midi, toujours pas de contractions en tout cas pas de contractions de travail, ni l’après-midi, ni le soir d’ailleurs...juste des petites contractions désagréables mais c’est tout. La sage-femme m’examine à nouveau, je suis toujours à 2 centimètres. Elle me conseille de dormir, de me reposer, cela ne sert à rien d’essayer de déclencher mes contractions à tout prix, elles viendront quand elles viendront même si je suis en train de dormir. Cela me rassure, je vais donc me reposer maintenant. Et si rien ne se passe cette nuit, ce sera le tampon de prostaglandine demain matin de toute façon.

Je relis mes notes sur les post-it collés un peu partout dans le précieux livre de Martine m’accompagne depuis 2 mois tous les jours maintenant. Comme avant un examen, je révise ! J’écoute mes enregistrements de préparation à l’accouchement par auto-hypnose comme je fais depuis 3 semaines environ dès que je m’assoupis, il m’arrive de m’endormir avec les enregistrements sur les oreilles (là j’écoute surtout celui sur l’ouverture, s’ouvrir, s’ouvrir encore plus...).

Et le lendemain matin toujours rien, Grant me demande comment ça va, son soutien est merveilleux, il est là avec moi depuis le début et ne veut pas rentrer dormir chez nous, il a mal au dos le pauvre il « dort » sur la chaise transformable en « lit » depuis jeudi, beaucoup de choses sont formidables à la Mutualiste mais pas les chaises/lit pour les papas...

Samedi 1er octobre 9heures toujours rien, je vais donc avoir droit au tampon de prostaglandine. J’aime bien la sage-femme qui m’examine, Muriel, elle a une petite fleur rose dans les cheveux, elle est douce et professionnelle, son prénom me dit quelque chose, mais oui Muriel ! J’ai vu son prénom dans des témoignages sur le site de Martine ! Toujours très positifs et laudatifs ! C’est un signe ! Je veux accoucher pendant le service de Muriel ! J’ai une chance que les choses se déclenchent d’ici ce soir, ce serait formidable ! La matinée se passe, toujours pas contractions, à midi je décide de manger un petit peu, je n’ai pas faim ou presque, c’est bon signe m’avait dit Muriel le matin.

Quelques exercices sur le ballon en début d’après-midi et là 14h30 ça y est ma première contraction de travail !! Une qui fait bien mal pendant au moins 30 secondes ! YESSS ! Je ne pensais pas que je serais si heureuse de les sentir ces fameuses contractions, mais après une journée et deux nuits d’attente, je suis ravie ! Elles sont irrégulières, une autre arrive au bout de 30 minutes, à nouveau je sens mon ventre tendu pendant 30 à 40 secondes mais c’est tout à fait supportable ! Si ce n’est pas plus intense ça va être une partie de plaisir ! Grant et moi décidons d’aller faire un tour dans le couloir pour passer le temps en attendant que les contractions deviennent plus régulières, pour l’instant elles arrivent toujours de manières irrégulières, 20 minutes, 30 minutes, puis toutes les 10 minutes environ ça y est ça se précise.

La technique qui m’est venue d’instinct pour surmonter la douleur et que je conserverai pendant toute la durée de la première partie du travail : je suis debout, j’appuie mes avant-bras contre le mur et je souffle en faisant le son OM ou plutôt la partie MMMMhhhh du son car je n’arrive pas à faire le « O » pendant les contractions, je fais aussi un mouvement de descente avec la main droite comme au Qi Kong pour encourager le bébé à descendre, je ferme les yeux pendant ce mouvement et que je fais le son MMMh je suis concentrée, je suis dans le moment présent, j’estime que j’ai de la chance car depuis 14h 30 la durée des contractions semble être de 30 à 45 secondes max plutôt que 60 secondes comme j’avais anticipé en cours de préparation à l’accouchement. Formidable c’est toujours ça de gagné ! Je demande à Grant d’appuyer avec ses pouces à l’arrière de mes lombaires comme nous avons vu avec la méthode d’accupression Bonapace pendant les cours de préparation à l’accouchement avec Christine puis Joëlle. Nous continuons notre trajet entrecoupé d’arrêt contre le mur du couloir à faire les OMMM vers la salle d’accouchement pour 16h30 comme m’avais indiqué Muriel pour l’injection d’antibiotiques, j’imagine que j’aurais le temps de retourner dans la chambre chercher le sac pour la salle d’accouchement, les balles de tennis, les affaires du bébé, une tenue de rechange pour moi, etc.

Quand Muriel me voit, elle décide de m’examiner car il semblerait effectivement que le travail ait commencé. Je m’allonge et trouve la position inconfortable pendant les contractions. Je suis à 4-5 centimètres ! WOW ! Déjà !! La salle nature est libre si vous voulez y aller nous dit Muriel. Génial !!! Exactement ce que je souhaitais ! Après un monitoring de 30 minutes qui me paraît une éternité tellement la position allongée est inconfortable pendant les contractions...je finis par me lever pour reprendre ma technique du mur et du OM avec Grant qui appuie sur les points au niveau des lombaires toujours. Ahhh ça va mieux. On y va nous dit Muriel qui nous encourage en nous disant que l’on se débrouille comme des chefs, ça fait du bien à entendre parce que les contractions semblent se rapprocher et augmenter en intensité. Dans la salle nature, Muriel me propose de prendre un bain, la chaleur peut atténuer la douleur, je suis pour ! J’essaie une autre position, accroupie à côté de la baignoire en attendant que Muriel la remplisse...ça ne marche pas du tout, je sens davantage la douleur car je perds ma concentration. Je me relève et retrouve le mur pour mes OMMMh. C’est mieux j’ai retrouvé ma concentration ! La baignoire est prête super ! Je me glisse dedans, la chaleur est agréable elle semble apaiser un peu la douleur des contractions c’est vrai. Je retrouve mes marques avec le son OMM, Grant continue de me faire des points d’accupression sur les épaules, je ressens une envie de pousser de plus en plus forte pendant les contractions. C’est irrépressible je pousse et mes sons Omm se transforment en GRRR rauques. Muriel qui nous avait laissé tous les deux pendant une demi-heure revient et m’examine à nouveau. Je suis à 8 cm !! Génial ! Elle me demande si nous souhaitons que la naissance se fasse dans la baignoire ??!! Ah oui pourquoi pas ? ! Je suis un peu surprise parce que je n’avais pas anticipé cette possibilité mais ravie, oui bien sûr ! si c’est possible, d’ailleurs à ce stade je préfèrerais ne pas en bouger de la baignoire ! Parfait je vais chercher le matériel pour la naissance nous dit-elle. Elle repart et revient rapidement avec une autre sage-femme Anne et une élève sage-femme Ambre. Elles m’entourent toutes les trois autour de la baignoire, Anne est à gauche, Ambre devant et Muriel qui est à ma droite continue le monitoring sous l’eau ! Grant derrière moi, je sens sa présence forte et ses encouragements. Il est impressionné par mes cris rauques. Moi-même je ne pensais pas avoir autant de voix, c’est irrépressible comme l’envie de pousser, j’ai besoin de hurler quand les contractions arrivent. Je suis toujours concentrée sur mes sons OMM enfin GRRRR. Chose incroyable, je m’endors 3 fois entre les contractions au plus fort, je ne pensais pas que ce soit possible ! Je l’avais lu dans le livre de préparation à l’accouchement par auto-hypnose mais je n’y croyais pas vraiment mais si pas de doute je me suis bel et bien endormie plusieurs fois pendant une minute ou deux, Grant me parle et je suis dans un rêve avec lui, il me parle aussi dans mon rêve, je lui réponds quelque chose qui n’a pas de sens, je suis dans mon rêve. Une fois même je me suis dit « mais qu’est ce qui se passe ici ? tiens une femme est en train d’accoucher ! ah mais c’est MOI ! I’M giving birth !! quelques secondes avant de répondre aux sages-femmes et à Grant que tout va bien je me suis juste endormie. je reprends mes esprits . Je récupère un peu comme cela avant qu’une nouvelle contraction arrive mais je commence à fatiguer. Ça y est je suis complètement dilatée. Il y a comme une phase d’accalmie avant le dernier effort. Muriel, Anne et Ambre me disent de pousser, que la tête du bébé est juste là ! Pourtant mes poussées ne marchent pas, puis j’ai compris ce que me dit Muriel, inspirez- bloquez- poussez ! J’avais continué à expirer en faisant OMM-GRR alors qu’il fallait bloquer la respiration et pousser !!! Maintenant j’ai compris ! En effet je le sens prêt à sortir mais je ne suis pas tout à fait prête, le bébé n’est pas tout à fait assez bas. Cet effort doit se faire avec lui, j’attends la prochaine contraction pour pousser de toutes mes forces, j’ai besoin de le sentir qui descend et veut sortir pour pousser. J’appuie mes pieds de toutes mes forces contre la baignoire pour pousser. Ce que je fais à la prochaine contraction, je prends une inspiration, bloque et pousse, ça y est la tête est sortie me dit Muriel !! Grant m’a dit plus tard qu’il a vu la tête de Curtis sortir une fois un peu puis re-rentrer pendant mes efforts jusqu’à ce qu’elle sorte vraiment ! Je n’ai pas eu cette impression ! Il faut recommencer à la prochaine contraction et là c’est la libération il sort facilement une fois que Muriel l’attrape par les épaules. Nous n’en revenons pas avec Grant notre bébé est là ! Grant coupe le cordon. Curtis est tout petit et tout mouillé mais tellement beau ! Les sages-femmes le laissent quelques instants sur moi dans la baignoire pour que nous puissions le regarder, Grant et moi sommes ébahis « we did dit ! » on s’embrasse.

Le placenta sort sans problème, nous demandons à le voir, drôle de maison pour ces 9 mois ! Et je suis recousue, 7 points de suture quand même, Curtis a éraflé le côté droit en sortant mais c’est une coupure droite ce qui est mieux me disent les sages-femmes.

Une sage-femme prend Curtis pour le sécher brièvement et vérifier que tout va bien pour lui avant de me le remettre sur la poitrine sur le lit dans la salle nature, le temps que je sorte de la baignoire et me sèche. Ils nous laisseront ensemble faire un « peau à peau » pendant deux heures dans la salle d’accouchement avant que nous retournions dans la chambre. Dans la salle nature Curtis cherche mes seins, il arrive à téter quelques gouttes de colostrum, c’est incroyable si petit et si fort déjà lorsqu’il s’agit d’aller vers la nourriture ! Je me souviens de son odeur, il l’a gardé quelques jours, une odeur de feu de bois que j’adorais. Je me souviens aussi d’une chose qui m’a impressionnée,

L’arrière de sa petite tête si parfaitement ronde avec quelques cheveux bruns. C’est elle qui est sortie en premier et que Grant a aperçu quelques secondes avant qu’elle ne sorte vraiment. Quelle merveilleuse aventure que la naissance de Curtis et ma naissance en tant que mère. Je n’en reviens toujours pas, quelle chance j’ai d’être enfin maman ! Grant adore son rôle de papa aussi, nous nageons en plein bonheur depuis 6 mois.

Katya